Avoir une stomie, temporaire ou permanente, constitue un changement majeur. Certains peuvent avoir besoin de beaucoup de temps et d'efforts pour accepter la vie avec une stomie. D'autres peuvent toutefois s'y faire plus rapidement. Votre réaction dépendra de votre personnalité et de votre situation — il n'existe pas de bonne ou de mauvaise façon de vivre avec une stomie. Nous avons recueilli les témoignages de personnes qui nous parlent de leur vie avec une stomie.
On m’a diagnostiqué la maladie de Crohn à l'âge de 16 ans, après une année épouvantable passée à souffrir d'épuisement, de douleurs, de vomissements, de diarrhée et de perte de poids. J'étais très affaiblie et je pesais moins de 38 kg. Je ne pouvais plus manger et l’odeur même de la nourriture me donnait envie de vomir. C'était comme si on me poignardait sans cesse dans le ventre. Je pouvais à peine marcher, je devais monter les escaliers à quatre pattes et quand on me touchait, même légèrement, j'avais l'impression de recevoir un coup de poing.
Nous avions déménagé, j'avais changé d'école et j'avais du mal à m'intégrer. Au départ, mon généraliste a mis les symptômes sur le compte du stress lié au déménagement et m'a prescrit un fortifiant. Plus tard, il a laissé entendre que j'étais anorexique et, malgré mes protestations et celles de mes parents inquiets, il n’a offert aucune aide ni aucun conseil.
J'étais trop faible pour passer les examens de mon certificat d'enseignement secondaire et j'ai essayé de retrouver des forces pour passer ceux du collège l'année suivante. Mais au mois de septembre, une semaine après mon entrée au collège, j'ai dû être hospitalisée pour une opération d'urgence au cours de laquelle on a retiré un tiers de mon côlon. J'ai enfin reçu un diagnostic et un traitement.
Malgré des périodes prolongées de maladie et une douleur immense, j'ai beaucoup voyagé lorsque j'avais une vingtaine d'années, car je voulais profiter pleinement de la vie. J'ai eu différents emplois intéressants pour financer mes voyages, comme assistante d’un magicien, chargée de promotion de vacances en timeshare, chanteuse dans un piano bar, conceptrice/fabricante de shorts de surf, membre d'équipage d'une traversée transatlantique, figurante au cinéma et à la télévision, modèle et institutrice maternelle.
J'ai parfois dû être hospitalisée à l'étranger et un jour, mes intestins ont été filmés à l'intention des étudiants en médecine de l'Aberdeen Hospital à Hong Kong ! J'ai rencontré mon mari et je l'ai épousé à Hong Kong.
En 2002, de retour en Angleterre et après avoir donné naissance à deux magnifiques enfants après deux grossesses extrêmement pénibles, ma santé a commencé à se détériorer. J'avais recommencé à être malade et en plus de la douleur et de la diarrhée, j'étais devenue incontinente. J'ai été admise à l'hôpital avec une occlusion totale de la section restante de mon côlon. C'est alors que j'ai rencontré pour la première fois une infirmière stomathérapeute. Elle m'a expliqué que je devrais rapidement envisager une iléostomie. À mesure qu'elle m'en parlait, je me suis rendue compte que je ne voulais pas attendre car j'en avais assez de souffrir. J'ai choisi de me faire opérer le lendemain afin d'éviter de prolonger ma maladie et ma souffrance.
J’avais déjà été opérée plusieurs fois avant l'intervention de stomie mais, la veille de cette opération, j'avais un pressentiment bizarre et, avant de donner mon consentement au chirurgien, je lui ai demandé si cette intervention était risquée. Il m'a répondu que tout irait bien et qu'il n'était pas nécessaire de m'informer des complications possibles. L'opération s'est bien déroulée, je me sentais bien en salle de réveil et mon mari m'a complimentée sur ma bonne mine malgré la lourdeur de l'intervention. Il m'a dit qu'il reviendrait dans l'après-midi avec les enfants.
Je me souviens avoir bu une tasse de café et je me suis dit qu'il était un peu étrange d'être autorisée à boire aussi rapidement après l'intervention, mais j'ai pensé que c'était grâce aux progrès effectués par la médecine. Pourtant, tout n'allait pas bien et lorsque mon mari est revenu avec les enfants, je vomissais des jets de bile. En fin de soirée, mon intestin était entièrement « collabé ». Il n'a pas pu recommencer à fonctionner avant 4 mois. Au bout de 6 semaines sans nourriture, j'avais beaucoup maigri et j'étais nourrie en intraveineuse. Ce n'est qu'après 6 mois, une deuxième intervention d'iléostomie, une septicémie due à ma sonde d'alimentation, des convulsions et une infection à SARM que j'ai enfin pu quitter définitivement l'hôpital.
Nos enfants avaient 6 et 9 ans à l'époque et cela a été une période très pénible pour nous tous.
Après la sortie de l'hôpital, mon permis de conduire a été suspendu pendant 6 mois à cause des convulsions dont j'avais souffert, ce qui m'a fait perdre une grande partie de mon indépendance. J'ai commencé à peindre pour faire passer le temps. Par un coup de chance, une école d'art s'était ouverte tout près de la maison. J'ai montré mes peintures aux professeurs et j'ai pu m'inscrire à un cours préparatoire en septembre, un an après ma première intervention de stomie. J'ai rapidement découvert que l'art était une forme de thérapie très efficace et mes souvenirs et traumatismes ont commencé à imprégner mon travail.
En tant qu'artiste, vous devez trouver votre style et le mien était nourri par ma chirurgie.
Avant et après mon opération, j'ai constaté que les gens semblaient avoir du mal à parler des stomies, c'est toujours un sujet tabou. J'aimerais beaucoup briser ce tabou et je crois que je peux le faire en exposant mes œuvres. Je peins et je sculpte, en m'inspirant de mon expérience de la maladie et de la stomie, et j'espère que mon travail contribuera à sensibiliser le public aux personnes stomisées.
Nous sommes tous différents et je ne dis pas que nous devrions tous exhiber notre poche de stomie, mais je pense que les personnes stomisées ne doivent pas se sentir gênées ni avoir honte de leur état, et une meilleure sensibilisation peut être utile.
Depuis que j’ai une stomie, je profite mieux de la vie car je suis enfin libérée des restrictions imposées par ma maladie. Je fais de la plongée et de l'équitation et nous voyageons à travers le monde. L'année dernière, nous avons passé un mois de vacances au Mozambique, nous avons plongé avec les raies manta et nagé avec les dauphins !
Un jour, à Bangkok, j'étais couchée au bord de la piscine de l'hôtel et ma poche dépassait de mon bikini. Un homme est venu me voir et m'a dit que j'étais très courageuse. Au début, je ne comprenais pas ce qu’il voulait me dire, mais il a confessé qu'il avait également une stomie, qu'il cachait sous un grand bermuda. Nous avons discuté pendant des heures.
Plus tard pendant ce séjour, nous nous étions installés sur une plage assez isolée au sud de la Thaïlande et, à cause de l'humidité, j'utilisais beaucoup plus de poches que prévu. J'avais contacté le fournisseur en Australie pour obtenir des fournitures, mais elles étaient malheureusement retenues à la douane et je risquais de manquer de poches. Il ne m'en restait plus que deux lorsqu'en me promenant sur la plage de cette petite île, je suis tombée nez à nez avec l'homme de l'hôtel de Bangkok ! Il m'a sauvée : j'ai pu lui emprunter quelques poches en attendant de recevoir les miennes. Si ma poche n’avais pas été visible au bord de la piscine, je n'aurais jamais parlé à cette homme et je me serais trouvée dans une situation très difficile !
Depuis mon intervention, je n’ai pris aucun traitement pour la maladie de Crohn. J'ai été suivie à l'hôpital tous les 6 mois pendant 3 ans et mes échantillons de sang étaient toujours normaux. Je n'avais donc aucune raison de prendre un traitement.
Je crois qu'il est très important de se voir comme une personne normale et en bonne santé. Évidemment, il m’arrive encore d'avoir de mauvais jours, mais je me dis que je vais bien et qu’il s'agit juste d’une journée « Crohnienne ». Tout le monde peut avoir un mauvais jour, peut-être parce qu'on a mangé quelque chose qui ne passe pas, parce que l'on est stressé ou tout simplement parce que l'on ne prend pas le temps de profiter de la vie. Mais lorsqu'on reçoit un diagnostic — qu'on peut mettre un nom sur la maladie — il est facile de lui attribuer chaque symptôme et de s'angoisser, mais cela peut empirer les choses. Donc, lorsque je me sens mal, je me promène dans la maison en me disant que tout va bien, et c'est le cas.
On me demande parfois de rendre visite à l'hôpital à des patients qui viennent de recevoir une stomie, sans qu'ils sachent que je suis stomisée. Je discute avec eux de leur expérience avant de leur révéler que j'ai moi aussi une stomie ; ils sont souvent très émus. Pourquoi ? Parce qu’ils ne peuvent pas voir ma stomie et ils ne se rendent pas compte que j'en ai une ; ils sont soulagés de voir qu'ils pourront avoir un aspect « normal » et vivre normalement. Tout le monde en est capable, il suffit de s'autoriser à vivre, sans s'imposer de limites. Tout est possible !
L'important pour moi, c'est qu'une poche soit confortable et sûre. Je dois pouvoir l'oublier et vivre pleinement. Comme moi, ma stomie est très active et changeante. J'ai donc besoin d'un système de poche souple qui m'offre une grande liberté de mouvement et me permet de me concentrer sur ma vie, au lieu de m'inquiéter du risque de fuite et de gêne. La plupart du temps, je n'y pense même pas. Ma poche est discrète et je peux m'habiller comme je veux, à quelques petits détails près. J'utilise un système deux pièces et je remplace la poche tous les matins après ma douche car j'aime avoir une nouvelle poche chaque jour. Mais je dois dire que la stomie, et tout ce qui y est associé, fait partie intégrante de ma vie et ne constitue absolument pas un obstacle.
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